PLFSS 2017 et Professions Libérales. Le projet de Loi de financement de la Sécurité Sociale, en son article VI-17 traitant de la « modernisation de la protection sociale des indépendants non agricoles » vise à diviser le corps social des professions libérales, pour ce qui touche à leur protection sociale, afin d’incorporer certains professionnels dans le régime maladie / retraite des commerçants et artisans. La Chambre Nationale des Professions Libérales ne peut, ab-initio, que déplorer que l’organe compétent, prévu par la Loi, à savoir la Commission Nationale des Professions Libérales n’ait pas été réunie à l’initiative du Ministre, ainsi que la Loi en faisait obligatoire. Nonobstant cette carence, qui peut-être une cause de rejet des dispositions prévues, la CNPL entend que sur cet important sujet elle puisse être entendue et qu’elle puisse apporter au projet de Loi, sous les réserves qu’elle formule, des modifications substantielles. 1/ Sur le plan des principes Les professions libérales constituent un corps social homogène, par leur compétence, par le dévouement qu’ils témoignent aux usagers de la médecine, du droit, des techniques et des métiers du cadre de vie. Ils ne constituent pas un ensemble corporatiste, mais servent une éthique dans des conditions propres à assurer la satisfaction de besoins indispensables aux usagers. Ils assurent, dans la proximité, la compétence et la disponibilité un lien indispensable à l’équilibre des sociétés modernes. Distraire de ce corps social, certains de leurs membres, à raison de la profession qu’ils pratiquent ou du mode d’exercice qui est le leur, constitue un exercice périlleux qui peut sembler, le prélude à une déstructuration d’un corps social utile à la nation, et qui doit rester uni dans ses principes. Le point d’entrée des dispositions proposées est l’affiliation, à des régimes différents de certaines professions libérales. 2/ Le point d’entrée des professions libérales a été sanctuarisé par une Loi de 2012. La Loi du 22 mars 2012 a figé, dans son article 29, la définition des professions libérales. L’article 29 est ainsi rédigé : « Les professions libérales groupent les personnes exerçant à titre habituel, de manière indépendante et sous leur responsabilité, une activité de nature généralement civile ayant pour objet d’assurer, dans l’intérêt du client ou du public, des prestations principalement intellectuelles, techniques ou de soins mises en œuvre au moyen de qualifications professionnelles appropriées et dans le respect de principes éthiques ou d’une déontologie professionnelle, sans préjudice des dispositions législatives applicables aux autres formes de travail indépendant ». On peut dire que cette définition brille par sa clarté et sa rigueur. La définition des professions libérales est en fait une équation à 5 inconnues : Première inconnue : C’est une activité généralement civile. Elle pourrait être commerciale, artisanale ou industrielle. Seconde inconnue : Les prestations délivrées sont principalement intellectuelles, techniques ou de soins qualifications professionnelles appropriées Principalement signifie, qu’accessoirement, les prestations pourraient être autre chose, manuelle par exemple comme celle des tailleurs de pierre de boulangers ou d’intermédiaire du commerce. Troisième inconnue : il faut justifier de qualifications professionnelles appropriées. Est-ce le CAP, le BTS, la licence, la maîtrise, le doctorat, l’agrégation, la Loi ne le définit pas. Aucun décret d’application non plus. Quatrième inconnue : il faut exercer « dans le respect de principes éthiques ». Ceux-ci sont-ils définis, esquissés ? Non ! Y a-t-il le début d’une énumération de principe généralement admis : absence de conflit d’intérêt avec l’usager, transparence dans la mission ou l’honoraire, respect du secret professionnel, pas davantage ! Cinquième inconnue : Tout cela est édicté «sans préjudice des dispositions législatives applicables aux autres formes de travail indépendant ». Ceci revient à dire que cette définition n’en est pas une puisque finalement d’autre forme de travail indépendant, ne répondant pas à ces critères, peuvent être incorporés aux professions libérales. On comprend qu’à partir d’une définition aussi floue, aussi imprécise, dont l’application peut-être à géométrie aussi variable, on vienne aujourd’hui faire la proposition qui est faite, pour apporter une réfaction dans l’unité de ce corps social, en ce qui concerne, à tout le moins sa protection sociale. 3 – Les dispositions proposées ne visent que l’affiliation à un régime de protections sociale. Tout d’abord la CNPL considère que le régime RSI des commerçants, artisans, qualifié par la Cour des Comptes comme une « catastrophe industrielle » n’est pas de ceux qui peuvent faire rêver. Ce régime n’a pas atteint sa maturité, il est structurellement déficitaire, et il a été créé, sans véritable concertation, dans la précipitation et sur des structures techniques obsolètes, le système d’information SNV2 n’étant pas en capacité de coordonner et de consolider et d’agréger les données maladies et retraites de la CANAMAM, de la CANCAVA, et de l’organic. C’est donc d’ores et déjà un écueil majeur. Ensuite la CNPL a bien noté que le V du projet prévoit une application différée dans le temps puisqu’elle sera fixée par décret entre le premier janvier 2018 et le 1er janvier 2019. Cette application différée sera obligatoire pour les travailleurs indépendants créant leur activité. Cette précaution fera que l’on ne touchera pas aux situations acquises. Le B – de ce chapitre V du projet de Loi prévoit également un droit d’option pour les professionnels libéraux qui souhaiteraient opter pour cette disposition nouvelle. Les trois acquis dans chacun des régimes étant convertis selon les méthodes actuarielles habituelles et éprouvées. Enfin, dans un délai de cinq années, le ministre établira un rapport sur l’impact démographique et financier des dispositions prévues au chapitre V. 4 – Ces éléments techniques et juridiques étant rappelés, La CNPL qui compte parmi ses affiliés l’organisation syndicale la plus importante d’autoentrepreneurs prendra en considération les observations et les propositions de cette organisation syndicale majoritaire. Celle-ci est à même de formuler les propositions qu’elle souhaite voir appliquer à ses ressortissants dans le respect des principes éthiques qui unissent entre eux les professionnels libéraux. La CNPL constatant que la loi du 22 mars 2012, en son article 29, est prise pour base à la création, par la Loi du 5 mars 2014, d’un secteur de représentativité intermédiaire, le secteur « multiprofessionnel » demande immédiatement, une modification de ces textes pour les rendre compatibles : D’une part avec l’article VI – 17 du PLFSS tel que proposé, De seconde part, avec la possibilité pour le ministre de prendre les décrets en Conseil d’État qui seront nécessaires à l’application pratique des dispositions projetées, De troisième part, avec l’évolution des modes d’exercice professionnels applicables à ce corps social : professionnel libéral indépendant, professionnel libéral salarié, professionnel libéral autoentrepreneurs, professionnel libéral associé ou dirigeant de sociétés d’exercice libéral (SELARL, SASU, EURAL….). Cette modification étant la cariatide destinée à soutenir toutes les réformes en ce domaine. La CNPL réclame une concertation immédiate sur ces sujets dans le cadre institutionnel qui est celui de la « Commission Nationale des Professions Libérales » placée sous la Présidence du Ministre de l’Économie. Enfin, les professionnels libéraux ne sauraient s’en remettre pour l’évaluation démographique et financière du projet à un rapport qui serait présenté dans les 5 ans de l’entrée en vigueur du Droit d’option prévue à la section D du projet, soit au plus tard en 2028. La CNPL demande donc la constitution immédiate d’une commission permanente au sein de laquelle elle siègera, afin d’examiner régulièrement l’ensemble des données, afin de ne pas renouveler la désastreuse expérience du R.S.I. Chambre Nationale des Professions Libérales